Archive for the 'Italie' Category

13
Juin
08

Cauchemar sur le train (2ème partie)

1ère partie

À la gare de Turin nous attendent trois carabinieri qui ont pris la relève après celui qui, sans souffler mot,  nous avait gardés pendant le trajet. De ma part, aucune intention de prendre la fuite. Dans une ville inconnue? Une sans-le-sou? Sans papiers? Ce sera plus sage de se laisser faire et voir où ça mène.

Oui, ça menait tout droit vers le panier à salade. Allez, hop. On y monte. La voiture démarre comme un éclair, sirènes hurlant à toute vapeur. Les passants pensent: qu’est-ce qu’elle est efficace, notre Superpolice, ils ont sûrement attrapé des délinquants dangereux.

La Questura est un bâtiment énorme, et maintenant je suis seule, car mes copains délinquants ont été amenés ailleurs. Dans un bureau privé, je dois faire face au détective qui m’assaillit de questions. Qui suis-je, que faisais-je à Rome, où vais-je, etc. Ça devient grave, puisque sauf un vague souvenir de gros mots appris au Poste de douane j’ignore les mots plus ou moins savants qui pourraient m’aider tout de suite. Mais voici un interprète qui arrive.  Uff… Je raconte tout, adresse à Paris, lieu de travail, nom de ma banque, cartes de crédit, etc., etc.

Question:. numéro de votre passeport?……… Zut! Rien, zéro, oublié…

Question:  numéro de votre compte en banque? Rien, zéro, oublié…

Question:  numéro de votre Carte de Séjour? Rien, blanc total. Zut zut zut !!!

Et ainsi de suite. Seul peut me sauver une vérification consulaire. C’est ce que je demande aux italiens car je suis toujours une étrangère suspecte et malfaisante. Bientôt un officier de mon consulat arrive au secours. Il paraît que le détective a écouté son intuition et me laisse partir avec le  bonhomme qui a promis de me prendre en charge dorénavant.

Pour le reste, tout se passe très vite. Au Consulat, une fois toutes vérifications avec Paris accomplies, je reçois un prêt pour m’offrir un repas (finalement !), me balader et faire mes photos d’identité. Entre-temps le Consulat préparait un Laissez-passer, achetait un billet pour le train Turin-Paris de 21 heures.

Puis, un officier du Consulat m’a conduit vers une grande salle. Ou je me suis effondrée sur des Superfauteuils en cuir pour dormir (finalement) jusqu’à mon départ. De temps en temps et puisque je suis à moitié endormie, j’entends des pas très discrets qui respectent mon sommeil avec soin. Après, on me réveille doucement, un taxi m’attend pour me conduire à la gare.

Subir à nouveau les controles de douane, quel cauchemar !!! Est-ce que le douanier va accepter mon Laissez-passer, est-ce que, est-ce que… Pendant que le train roule j’ai des flash-backs, je revois ces paysans habillés en complet bleu. En attendant le départ du train ils sont toujours sur le quai, cette fois en face de mon compartiment. Ils ne font des adieux à personne. Ils me regardent à travers la fenêtre, font des grimaces, rient et chuchotent.  Maintenant je comprends, trop tard !!!

Quelques mois plus tard j’ai appris que, dans la matinée de cette journée, mes joyeux parents en vacances faisaient le tour de Turin en voiture. Mais moi, je traversait la ville en tant que prisonnière. C’est possible que nos chemins se soient croisés et qu’ils aient regardé d’un oeil curieux ce bruyant panier à salade!

par Ana Tejero

09
Juin
08

Cauchemar sur le train (1ère partie)

Fin de vacances à Rome, je rentre à Paris pour reprendre mon travail. À la Stazione Termini le train attend, sur le quai il y a des groupes de gens qui font leurs adieux. Un petit groupe de quatre ou trois hommes et deux femmes bloquent mon passage quand je veux monter. Tous en costume bleu, bien vêtus. Trop bien vêtus. Chapeaux, cravate, chemise blanche pour les hommes. En tout cas, ils ont l’air de paysans venus pour une fête de mariage? qui sait.

Bon, donc, avec ma grande valise je finis par me faufiler parmi eux et je monte. Trouve ma couchette en haut, m’installe. Pip pip, voilà le train qui part tout doucement.

Suis prête à dormir jusqu’à mon arrivée à Paris.

Deux heures du matin. Le train s’arrête, il fait très froid, on vous réveille brusquement car on est à la frontière (Ventimiglia?)  pour le contrôle de papiers. Mon passeport et mon argent sont dans une pochette que j’avais mise dans mon sac. Mais hélas, la pochette n’est plus là, ni nulle part. Désespoir. Je cherche partout, est-ce qu’elle a glissé sur ma litière? Est-ce qu’elle est tombée par terre? Est-ce que,  est-ce… Non, disparue !!! Un vrai cauchemar !!!

Les douaniers me font descendre et, faute d’aide avec une valise de plus en plus lourde, je marche péniblement sur la neige. A quelques mètres se trouve le poste frontière, ils me poussent dedans sans ménagements. Le train est déja reparti.

Donc, me voilà au Commissariat, partout des sans-papiers, tunesiens, sudaméricains, marocains, qui hurlent sans comprendre l’italien, des flics qui hurlent pour se faire comprendre. Et des fois, en ajoutent des coups. Engeulades.

Un des flics est assis derrière un bureau, le reste, nous patientons debout. Ça dure des heures. À ce moment-là voilà que je reçois un cours express et gratuit de gros mots en italien. Remerciements! Je profite aussi de cette leçon.

Mais, encore plus important, j’ai compris ce que veut dire l’Identité. Comment prouver qui on est? Je pouvais bien dire que j’étais Mme. Bovary ou n’importe qui, ça aurait été pareil. Je prie le Grand Flic de téléphoner à Rome, demander si mon passeport a été trouvé à la gare ou sur les voies. Sauf pour l’argent le reste ne devrait être utile à personne.

Ah, mais non, nous, on a pas le droit de passer des coups de fil à d’autres villes. Même dans l’Italie? Même…

Le temps passe, pas de café, pas de chaise, pas de réponse, pas d’eau, c’est déjà bien entrée la matinée et on est fatigué, ennervé, on maudit les italiens, les voleurs et les flics. On déteste tout le monde.

Dans mon cas, M. le Flic a pris une décision. Me virer vers la Division pour les Étrangers en faute à la Questura de Turin, un Commissariat important dans une ville importante. Mais un petit détail, il faut prendre un train local, et dans ce cas, je dois payer mon billet. C’est pas cher pour un trajet court mais, de quoi il parle?, Je n’ai pas d’argent sur moi, ils sont au courant, ils s’en fichent. Cela dit, ils m’escortent jusqu’à la petite gare ou le train pour Turin attend.

Saisie d’étonnement!  Que faire? Je fouille dans mes poches. Rien. Et voilà q’un ange gardien apparaît sur le quai caché dans le corps d’un modeste flic. Il m’approche d’un air furtif, puis, en cachette, me glisse la monnaie dont j’avais besoin. Avec son doigt sur la bouche il me fait signe de me taire. Je faillis fondre en larmes. Pas question de lui rembourser, n’ayant rien sur moi pour le remercier. Sauf un simple briquet bon marché. Je le lui donne, les larmes coulent sur mon visage. Je fais la paix avec les italiens et quelques flics. Son visage est resté pour toujours dans mon coeur, tout comme son petit grand geste. Une nuit remplie de leçons, une fois de plus je comprends comment c’est inutile de mettre tout le monde dans le même sac.

Le train pour Turin démarre, nous sommes quatre détenus fatigués marchant vers qui sait quels nouveaux pépins.

 

par Ana Tejero




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