Ce billet est la suite et fin du 1er épisode.
Comme dans de nombreuses courses, la marche d’approche jusqu’au refuge suit la moraine du glacier; La moraine marque les bords du lit d’un glacier; elle est caractérisée par un amas de rochers trainés et accumulés par le glacier. On dirait un peu comme une dune sauf que la forme de sa coupe caractéristique et plus pointue. Souvent on trouve le long de cette crête un sentier qui permettait de remonter le glacier en sécurité, sans passer au milieu des séracs et des crevasses. Maintenant, avec le réchauffement climatique les glaciers qui ont généré les moraines tendent à perdre du terrain et remonter en altitude; J’avais observé ce phénomène impressionnant en l’espace de 6 ans au Glacier Blanc dans le Massif des Ecrins (Alpes) c’est aussi le cas au Huayna Potosi. Porfi, le guide me dit même que les géologues prévoient une disparition totale des glaciers d’ici 50 ans; ce qui est une catastrophe pour La Paz dont dépend l’approvisionnement en eau et en électricité .
La marche d’approche se fait bien pourvu qu’on ait été habitué à l’altitude en séjournant quelques jours sur l’Altiplano; pour ma part, j’avais passé 3 jours à Potosi (4070m) juste avant de débarquer à La Paz donc pas de souci.
A midi nous atteignons le refuge. Il est en fonction depuis a peine 1 an et demi. Dispose de l’électricité grâce à un panneau solaire. Électricité qui est distribuée dans la petite pièce à vivre par des câbles de sonorisation Hifi; ce n’est pas la première fois que je vois ça en Bolivie. Nous sommes les derniers arrivés, sur place il y-a Alex -israélien, c’est dingue le nombre d’israélien qu’on croise en Bolivie, on trouve même couramment les menus traduits et hébreux-, Marc -Américain-, un couple d’australiens et votre serviteur cuisse de grenouille. Chacun est accompagné d’un guide. Je suis impressionné par le monticule de bouteilles plastiques qui sont entassées devant le seuil refuge! Je n’avais jamais vu une chose pareil en France! En règle générale, ceux qui pratique la montagne ont conscience de la fragilité du milieu et le respecte,notamment en redescendant ses déchets…
Le diner est servi a 17h. J’espérais échanger quelques chants montagnards français contre leurs équivalents locaux, mais finalement je suis le seul à chanter et à jouer de l’harmonica. Et tous ont eu la politesse de faire au moins semblant d’aimer . A 19h extinction des feux. Je peine à m’endormir, j’ai mal aux bras, de manière assez diffuse, un peu comme si j’avais des courbatures mais en moins fort; je n’avais pourtant pas fait d’effort particulier avec mes bras, il parait ce ce sont les effet de l’altitude. Je tourne et me retourne dans mon duvet assez longuement avant de trouver le sommeil.
La nuit est courte est agitée. Le réveil difficile mais rappelant de bon souvenirs. La météo est excellente, pas un nuage sur notre zone et pourtant il ne fait pas très froid; de toute façon je n’ai jamais été autant équipé. Les cordées quittent le refuge a 1h du matin. Le lune, au 3/4 pleine, nous permet de progresser sans nos lampes frontales. Le rythme est tranquille et pour limiter les effets de l’altitude, je chique quelques feuilles de coca. Techniquement parlant, la voie normale ne présente que 2 légères difficultés. La “pala pequeña” et la “pala grande”, qui sont 2 passages de forte inclinaison et de longueur respective 40 et 200m. Le manque d’oxygène se fait ressentir, mais la beauté des paysage fait oublier l’effort. Le silence de la nuit est à peine troublé du bruit de nos respirations lentes et régulières. De l’autre coté de la cordillère Real, coté tropical, de nombreux nuages moutonnent et de temps à autre un éclair vient illuminer notre versant. Le spectacle est magique, le son du tonnerre ne nous parvient pas; on entent que le bruit de la neige qui craque doucement sous nos pas. Au dessus de nos têtes, les étoiles scintillent, c’est vraiment féérique.
La régularité de notre pas nous isole en tête des cordées assez rapidement. Nous progressons en crampons, corde tendue, le piolet toujours dans la main amont. Nous faisons de courtes pauses pour manger une barre de chocolat (glacée) et nous hydrater. Sur une bosse nous admirons le passage escarpé de la voie dite « française ». Il s’agit d’un itinéraire passant sur une ligne de crête assez technique ouvert par des français. Les dernières longueurs dans la pala grande sont éprouvante, la pente est forte et je suis obligé de m’arrêter tous les 3 mètres. Heureusement le soleil ne s’est pas encore levé et la neige est en bon état, et puis je suis motivé à bloc, il n’y a plus de raison de ne pas y arriver. Alors je dois me prouver à moi même que je peux le faire; comme l’avait remarqué Greg précédemment il y a aussi une sorte de compétition internationale qui joue! Chacun se sentant un peu le porte drapeau de son pays…
Nous arrivons au sommet avant le lever du soleil. Il ne fait pas si froid que ça, mais la batterie de l’appareil photo n’apprécie pas trop. On voit au loin les lueurs de La Paz. Et l’aube qui commence à poindre. Il eut fallut que Dul ou Patrick soient là pour saisir les nuances des reflets dans le ciel noir… avec mon petit numérique je n’ai pas réussi à sortir de cliché qui fasse ressortir la beauté éphémère du moment. Mais une fois la beauté du spectacle consommée, nous savons que le soleil sera une plaie pour nous, il dégrade la qualité de la neige, fait mal aux yeux et tient chaud… aussi nous repartons sans plus attendre. Nous croisons la cordée de l’américain et celle des australiens au bas de la pala grande. Ils semblent progresser assez difficilement.
Au camp de base, le taxi nous attendait, il nous a offert un verre de Coca, dont nous avons soigneusement renverse une part par terre en offrande a la Pachamama et au Huayna Potosi, puis je me suis avachi sur la banquette arrière et dans un moment d inconscience j ai cherche la ceinture de sécurité; c’est vous dire si j’étais déjà dans un état second.
Je me connecte de nouveau – mon sevrage Internet se passe tant bien que mail, mais l’etat des becannes et des connexions en Bolivie a un effet assez dissuasif- et je prends des nouvelles du monde. Il semble que cela chauffe pour les pinguins en Argentine et que les routes, tout du moins au nord soient bloquees, plus de viande, je sens que les argentins vont bientot devoir se rabatre sur le pinguin grille… et il me faut repasser par Buenos Aires prochainement!
Commentaires récents